18 mars 2006

Il est interdit d'interdire d'étudier

Jeudi soir, 21 des 84 universités françaises étaient entièrement bloquées par des étudiants. Ce vendredi, le chiffre est redescendu à 16, mais il reste élevé. Et là on cherche une logique. Quel est le but pour des étudiants de bloquer leur université ? Est-ce que le gouvernement ne va pas pouvoir aller assister à ses cours d'économie et va donc céder sur le CPE ? Non, bien sur que non. Ceux qui sont pris en otage, encore une fois, ce sont les étudiants sérieux qui aimeraient bien assister à leurs cours, rendre leurs disserts et réussir leurs partiels dans deux mois. La stratégie de l'UNEF (le soi-disant syndicat étudiant) est donc de prendre d'autres étudiants en otage par des moyens illégaux, pour obliger le gouvernement à céder. Cette démarche de certains étudiants qui consiste à décider pour les autres étudiants ce qui est bons pour eux, et de les empêcher de faire ce qu'ils ont en toute justice le droit de faire, est excessivement illégitime, et ne devrait appeler de la part d'un gouvernement quel qu'il soit qu'une réponse légale. Non pas en envoyant les CRS sur la Sorbonne comme l’a fait notre ministre aux hormones, mais en assignant l'UNEF devant la justice qui pourra condamner l'organisation à une astreinte par jour d'occupation par exemple. C'est d'ailleurs ce que certains étudiants ont fait en saisissant le tribunal administratif en référé afin d'obtenir la reprise des cours, à Grenoble, Limoges et Nancy 2 par exemple.

Le moyen légitime de se prononcer contre le CPE est de manifester dans la rue, signer des pétitions et inonder Matignon de lettres d'insultes, mais PAS d'occuper les universités.

12 mars 2006

Droit à l'avortement ou droit à la vie ?

Le débat fait rage depuis qu'un État américain, le Dakota du Sud, a décidé d'interdire totalement l'avortement, même en cas de viol ou d'inceste, et même la pilule du lendemain. Cette décision pourrait être suivie par une dizaine d'autres États républicains, alors que dors et déjà, une trentaine d'États ont sévèrement limité le droit des femmes à l'IVG par l'intermédiaire de décrets, le tout suite aux pressions de groupes religieux ultra-conservateurs... Que l'on sait très proche de Washington.

Les défenseurs de l'interdiction de l'IVG se nomment eux-mêmes les pro-lifers, c'est-à dire ceux qui sont "pour la vie". Ils considèrent en effet que le fœtus, quel que soit son stade de développement, est un être humain à part entière. Donc l'acte de l'IVG est assimilé à un meurtre d'enfant... Cette interprétation, qui gagne de plus en plus de terrain aux États-Unis en même temps que l'évangélisation du pays avance bon train, a justifié des dérives assez extrêmes. Ainsi, chaque année des médecins pratiquant des avortements et des patientes l'aillant subi sont assassinés. De plus, les sévères régulations concernant les cliniques pratiquant l'IVG ont conduit bon nombre d'entre elles à fermer leurs portes, au point qu'il n'en reste plus qu'une seule pour tout le Mississipi...

Pour
apporter plus de matière scientifique au débat, rappelons qu'avant la 10ème semaine de grossesse, il s'agit d'un embryon et non d'un fœtus, et que l'embryon n'a pas encore tous ses futurs organes. C'est d'ailleurs pour ça que la législation française n'autorise l'IVG que jusqu'à la 12ème semaine. Le fœtus n'est viable qu'à partir du développement de ses poumons, entre la 20ème et la 24ème semaine (6 mois de grossesse), et c'est la plus longue limite qui existe pour l'IVG dans d'autres pays du monde. Le problème n'est finalement pas scientifique, mais éthique. Les religieux et certains intellectuels considèrent l'embryon, et le fœtus à fortiori, comme un humain potentiel, et finalement un être humain tout court, qui a donc les mêmes droits que n'importe quel autre être humain. Quels que soit les circonstances de sa conception, il n'en est pas responsable et ne peut donc être "puni" pour ne pas avoir été voulu, ou pour avoir été conçu a l'issue d'un viol.

L'autre point de vue est que avant que son potentiel ne se soit réalisé, un embryon ou même un fœtus n'est pas un être humain, et que donc la volonté de la mère l'emporte sur son droit à la vie. C'est un point de vue qui respecte le droit des femmes à décider de leur propre corps, et qui entrait bien dans les politiques de planning familial.

Quelque soit l'interprétation que l'on choisisse de l'humanité de l'embryon, il ne faut surtout pas sombrer dans un fondamentalisme conservateur, ni libéral. L'objectif devrait toujours être de limiter au maximum le nombre d'IVG, mais sans renier le droit des femmes à ne pas vouloir de l'enfant qu'elles portent. La contraception doit être le moyen privilégié, car éthiquement beaucoup plus neutre, et au cas par cas il peut être utile d'examiner les raison poussant les femmes à vouloir avorter, afin de régler leurs problèmes d'une manière différente. Par exemple par l'adoption, ou une aide financière de l'État ? Car qu'on le veuille ou non, une fois conçu, un embryon est une responsabilité dont il ne faut pas se débarrasser à la légère. Le choix doit-être bien pesé afin d'éviter la dérive russe, où l'avortement est considéré comme un moyen de contraception, et où il y a plus d'IVG pratiqués chaque année qu'il n'y a de naissance...

Rappelons finalement que le deuxième pays le plus riche d'Europe interdit toujours l'avortement de la même façon que le Dakota du Sud, et viens même de rejeter
par referendum un projet de loi l'autorisant : il s'agit de l'Irlande...

01 mars 2006

Fusions !

OPA de Mittal sur Arcelor, OPE entre GDF et Suez, l'actualité des fusions et acquisitions est remplie. Et toutes permettent de soulever la question du "patriotisme économique" demandé et appliqué par de Villepin. Il s'agit de mettre un peu plus qu'aujourd'hui l'économie et les entreprises au service du pays. Par exemple en consommant français, ou en ne fermant pas les usines françaises pour aller s'installer en Inde...

Pour le coup il s'agit de protéger les entreprises "françaises" contre les méchants prédateurs étrangers. Et étranger inclu tout ce qui n'est pas français... On nous refait le coup du laboratoire Aventis racheté pour 48 milliards d'euros par son concurrent Sanofi, plus petit que lui mais ayant le mérite d'être français, pour éviter de se faire racheter par Novartis. À l'époque ça avait jeté un froid avec Berlin. Cette fois c'est l'italien Enel, qui tenterait de racheter Suez, qui est l’ennemi à combattre. Quitte à remettre en cause les différentes promesses faites aux syndicats de garder GDF publique. On peut certes considérer l’énergie comme un secteur stratégique, mais Suez reste un très petit opérateur face à EDF, et ce n’est pas vraiment l’Italie qui représente une menace pour la France… D’autant que le numéro 2 italien de l’énergie s’est fait racheter par… EDF ! Quand à la métallurgie, c’est très loin d’être un secteur stratégique, et l’État français n’a absolument pas à intervenir.

Encore une fois donc, il s’agit soit d’une bêtise de nos politiques qui va se transformer en crise européenne, soit tout simplement d’un effet de montre, avec un signe fort en direction de la droite nationaliste… Et une diversion pour nous faire croire que le gouvernement agit pour l’économie, pendant que le CNE montre sa totale inutilité…